mardi 21 avril 2009

FABULO FABLE : AILLEURS

photo personnelle

AILLEURS
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Dans un petit étang, vivait un petit monde:
Faune microscopique de poissons argentés
De mollusques, de vers, de larves, de crustacés
Barbotant sans conscience en une eau peu profonde
...
Chacun vivait sa vie, ignorant tout du monde
Qui s'étendait autour de sa flaque-univers
Et ne cherchait en rien à sortir de sa ronde
De son petit manège tournant entre deux pierres
...
Jusqu'au jour où survint, dans une éclaboussure
Un animal étrange à la forte stature
Il était terne et laid, il se disait crapaud
Et prétendait connaître l'au-delà de l'eau
...
Sceptique mais curieux, le peuple un peu moqueur
Se réunit en masse tout autour de l'intrus
Pour l'entendre évoquer les contrées inconnues
De la terre et de l'air, d'un incroyable "ailleurs"
...
Il leur conta les fleurs dans les vastes prairies
Les montagnes, les collines et la neige au soleil
Les arbres et les plantes, les forêts infinies
Et du monde aérien les diverses merveilles
...
Pendant le long discours du personnage palmé
Chacun rit de bon coeur et souvent s'esclaffa :
Ce n'est pas tous les jours que l'on peut s'amuser
Et ce crapaud farceur en cela les combla !
...
Lorsqu'à la fin, vexé, d'un bond, il s'échappa
Les mollusques et les vers, les larves et les poissons
Ne dirent rien du tout, ne s'en offusquèrent pas
Et reprirent aussitôt leur ancienne position
...
Tout juste reste-t-il quelques mamans poissons
Qui content encore le soir à leurs petits bambins
La belle et folle histoire du crapaud vagabond
Tombé du ciel un jour, mais c'est déjà si loin...
...
Ainsi recevons-nous les nouvelles du monde
Quand elles ne rentrent pas dans un cadre connu :
Les voilà rejetées en moins d'une seconde
Et vite nous retournons aux vieilles rondes sans issue !
...
C'est que nous préférons nos idées confortables :
Nos frontières mentales nous protègent si bien
Du mystère des choses, de l'incommensurable,
De la magie présente au coeur du quotidien
...
Que nous traitons de fou celui qui dit le vrai,
Qui vit entre deux mondes, avec les yeux ouverts
Celui qui dit "voyez!" et celui qui connaît
Un peu du ciel caché derrière notre ordinaire...
..
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La Licorne
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6 commentaires:

  1. Réflexion pertinente sur ces regards qui ne regardent que la surface, qui ne cherchent pas l'infime qui pourrait infléchir une décision ! Il y a des personnes qui savent bien faire ça et tu en fais partie : le monde des poètes, le monde des fabulistes et pourquoi les fables traversent-elles le temps ? Ne sont-elles pas le garde-fou de la pensée établie, voire unique ?
    Bonne fin de journée

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  2. C'est une bien jolie fable que voilà ! Un peu onirique, un peu narquoise, mais très juste, à propos de nous tous, en somme, qui nous arrêtons trop souvent à l'apparence... et c'est bien le but d'une fable, n'est-ce pas, que de montrer les défauts de l'humanité... Alors c'est promis, aujourd'hui, je fais attention et j'écoute ce qu'on me dit d'une autre oreille !

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  3. Cela me fait penser à une belle histoire, vraie, à méditer. Pour la connaitre, connecte toi à :
    http://www.dailymotion.com/video/x8pfk7_stop-and-hear-the-music_school
    Il y a tant de belles choses à côté desquelles nous passons sans un regard, par ignorance !
    "En croyant à des fleurs, souvent on les fait naitre"

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  4. Magnifique ! J'aime beaucoup.
    Bravo

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  5. Une poésie "fabuleuse" à mettre entre toutes les mains. Chacun de nous sommes dans notre petit monde, élargir sa vision demande quelques efforts et quelques moyens.
    Mais la technologie médiatique avance à grands pas et un jour un crapaud racontera : "si tu ne vas pas à Lagardère, Lagardère ira à toi".
    Sans compter certains blogs que certains parcourent à la recherche de...

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  6. Je découvre avec plaisir vos commentaires...
    Merci !

    Et merci Sophie, pour la référence de la vidéo sur le violoniste !
    Très instructif !

    Reconnaît-on la beauté dans un cadre banal ?
    Ou comment passer chaque jour à côté de l'extraordinaire sans jamais s'en apercevoir !

    N'est-ce pas ce que nous faisons sans cesse: pris dans la "ronde " de nos préoccupations, nous oublions d'ouvrir nos yeux et nos oreilles aux merveilles que nous côtoyons...merveilles toutes proches, présentes ici et partout, mais noyées par la banalité...

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